GILARDI : Exactement, mais le principal est que nous ayons réussi à passer le temps pendant la mi-temps. Alors que les joueurs reparaissent un à un sur la pelouse, il est maintenant grand temps d'enchaîner avec la seconde période ! Le score est, je vous le rappelle, de six à sept pour les Dreamers !
COUDERC : Chaque équipe semble avoir effectué un remplacement. Les Legends ont fait entrer Thierry Dusautoir à la place de François Pienaar, et du côté des Dreamers, l'ouvreur Driss Keller a cédé son poste à Ulquiorra Schieffer !
GILARDI : Voilà qui devrait apporter du sang frais aux deux sélections, de manière à redynamiser le jeu. Il est également bon de rappeler que Thomas, le premier centre du Rugby Club Dreamers, a encore plusieurs minutes à passer sur le banc de touche à cause d'un carton jaune.
COUDERC : Vous faites bien de le préciser, Thierry. Sur ce, l'Irlandais Wood s'apprête à botter le ballon pour démarrer cette deuxième mi-temps ! Il l'envoie à la distance minimum, espérant sans doute pouvoir user à nouveau de la supériorité en l'air de son équipe pour le récupérer...
GILARDI : Et il s'agit d'un excellent choix ! O'Connel est en effet parvenu à devancer la retombée de la balle et à la chiper au nez et à la barbe de Max le Charpentier. Encore une fois, les Legends imposent leur expérience et donnent du fil à retordre à leurs concurrents. Les Dreamers ont-ils besoin de temps pour se remettre dans l'ambiance, ou leurs chances de tenir leur avantage sont-elles réellement si basses ...?
COUDERC : Le ballon est transmis vers Imanol Harinordoquy, que nous n'avons pas encore aperçu, il me semble...
GILARDI : Du moins, nous n'avons pas mentionné son nom. Et comme nous sommes des commentateurs professionnels qui n'omettent jamais aucun détail, cela signifie effectivement qu'il n'a pas eu l'occasion de faire preuve de ses capacités.
COUDERC : Quelle confiance en vous, Thierry ! Mais il est vrai que nous sommes la crème des commentateurs. Par exemple, la seconde période vient à peine de commencer, mais si j'affirmais que nous en sommes déjà à la quarante-huitième minute, personne ne viendrait me contredire !
GILARDI : Un tel culot est le privilège des personnes de haut rang, Roger ! Tiens donc, je ferais mieux de reprendre mon bloc-notes, car un nouvel indice nous parvient justement, en ce début de reprise !
COUDERC :
La façon dont se déploie l'équipe des Dreamers ressemble à présent à un « V ». Je me demande tout de même à quoi tout cela va nous mener...GILARDI : Nous verrons, Roger, nous verrons ! En attendant, Harinordoquy est toujours sur le point de recevoir le ballon... Car oui, en plus d'être des journalistes de qualité, nous sommes capables d'échanger plusieurs répliques en l'espace d'une passe !
COUDERC : Le troisième ligne français est d'ores et déjà chargés par deux joueurs adverses, Dracule et Aotsuki, prêts à le plaquer sitôt qu'il réceptionnera le ballon...
GILARDI : Mais il ne tend pas ses mains pour l'attraper ! Il envoie directement son pied et frappe la balle en une reprise soudaine ! Les deux coéquipiers du Rugby Club Dreamers se voient coupés dans leur élan, dans l'impossibilité de plaquer !
COUDERC : Impuissants, ils ne peuvent que constater l'ovale qui passe au-dessus de leurs têtes, et Harinordoquy qui le récupère ensuite dans leur dos ! Ce dernier a franchi une ligne, mais au-delà de celle-ci, Clive veille !
GILARDI : Néanmoins, Harinordoquy n'est pas décidé à s'arrêter en si bon chemin ! En effet, il a au moins autant de tours dans son sac que de lettres dans son nom ! Il envoie un coup de pied rasant entre les jambes de l'homme aux cheveux argentés et le contourne vivement.
COUDERC : En quelques secondes il s'est débarrassé de pas moins de trois adversaires directs ! Mais il doit à présent se hâter de récupérer la balle qui fuse à terre, et vers laquelle Winter se dirige également ...!
GILARDI : Deux adversaires qui se précipitent simultanément sur un ballon qui roule à terre... s'agirait-il d'un nouveau duel ? Imanol Harinordoquy contre Emerald D. Winter ??
COUDERC : Et c'est reparti pour un tour... Au passage, nous en sommes à la cinquantième minute de jeu, en toute logique Thomas va donc récupérer sa place. Son absence ne se sera pas tant faite ressentir au final...
GILARDI : Ouais ouais, en attendant les deux joueurs courent les bras tendus en avant, attentifs aux rebonds irréguliers du ballon. Winter semble être le plus à même de le saisir, lorsqu'une motte de terre fait bondir la balle entre ses mains ! Il s'est lancé trop tôt et le ballon vient de lui filer entre les doigts !
COUDERC : Hari – ouais c'est long de dire à chaque fois son nom complet – s'est montré plus prudent sur ce coup et ne s'est pas emporté ! Il effectue alors un saut pour récupérer la balle en l'air, se délectant déjà de sa petite victoire sur ce quatrième adversaire direct !
GILARDI : Mais... une patte verte vient de se poser sur le dos de Winter, accroupi ! Il s'agit du dinosaure Legro – c'est plus court également – qui prend appui sur son partenaire pour s'élancer dans les airs !
COUDERC : Et il parvient même à atteindre la balle avant Hari, décontenancé. Encore une fois il la frappe de son nez qui se voit comme la patate au milieu de la figure, pour l'envoyer droit dans les bras du numéro 20.
GILARDI : Schieffer, qui touche là son premier ballon depuis qu'il est entré au début de la seconde période ! C'est ici que le choix du coach va certainement prendre toute son importance, ce nouvel ouvreur a sûrement été mis en jeu pour aider à creuser l'écart, le résultat sera-t-il celui attendu ??
COUDERC : Le pâle individu s'élance et, sans aucune hésitation, tape le ballon vers le ciel ! Après un lob et un coup de pied rasant de la part de Hari, nous avons maintenant droit à une chandelle ! Le jeu au pied est à l'honneur en ce moment !
GILARDI : La précision de ce coup de pied est saisissante ! Il l'a délibérément décalé vers la droite en prenant en compte le vent qui va déporter la balle. Ainsi, il a juste à courir droit devant lui pour se rendre à son point de chute !
COUDERC : Précédé de Winter, qui lui sert à nouveau d'appui, il s'envole et ne laisse aucune chance à Giteau, qui venait disputer la retombée du ballon !
GILARDI : Sacré Winter, ce rôle de marche-pied n'est pas des plus agréable, mais il est pourtant diablement efficace !
COUDERC : En effet, Thierry ! Les balles aériennes étaient jusqu'à présent l'un des points faibles de cette équipe du Rugby Club Dreamers, mais cette stratégie leur permet d'effacer ce désavantage !
GILARDI : Le ballon entre les paumes, Schieffer retombe souplement au sol. Il se trouve maintenant à un peu plus de trente mètres de la ligne d'en-but, mais O'Driscoll et Lomu qui lui font face ne paraissent pas décidés à le laisser avancer plus loin.
COUDERC : En tant que demi-d'ouverture, il pourrait tenter un drop. Mais là encore, ses concurrents le pressent de trop près et le ballon n'aurait aucune chance de passer leur contre. C'est pourquoi il préfère passer à... non ! Je rêve ! Il se met à effectuer des petits pas à reculons, tout en fixant intensément les barres !
GILARDI : Il s'agit du mouvement de Wilkinson, qui nous a impressionné au cours de la première mi-temps ! Prévoirait-il d'accomplir un drop de la même incroyable façon ??
COUDERC : J'ai bien l'impression que oui !! Après avoir reculé de quelques mètre et sans stopper son mouvement, il vient de lâcher le ballon. Du plat du pied il le frappe puissamment, réussissant à lui donner une trajectoire convenable malgré son déséquilibre évident !
GILARDI : La balle voltige vers les barres, mais il semblerait que Schieffer, dans ce geste technique délicat, n'ait pas pu assez considérer la brise. L'ovale se voit déporté sur la gauche, et heurte finalement le montant avant de revenir dans les limites du terrain !
COUDERC : Mon dieu ! Quel dommage, il était si près du but !! Mais la possession revient aux Legends, avec l'arrière Montgomery qui s'apprête à relancer le jeu.
GILARDI : Je pense cependant à quelque chose, Roger. Schieffer a tenté le même drop que Wilkinson, on pourrait donc dire que ces deux joueurs s'affrontent sur un plan technique. Même s'ils ne connaissent pas de confrontation directe, il est tout à fait approprié d'annoncer le seul et unique duel qui va s'étaler sur toute la durée du match : Jonny Wilkinson contre Ulquiorra Schieffer !!
COUDERC : Ma foi, cela ajoutera du piquant à la rencontre... Nous en étions donc à Montgomery qui s'occupait de remonter le terrain. L'arrière africain se voit alors confronté à Dragmire. Ce dernier le plaque sans ménagement, et Montgomery transmet alors la balle sur sa gauche, à Shane Williams.
GILARDI : Les Legends sont fabuleusement placés en escalier, et attendent le dernier moment pour passer le ballon à leurs coéquipiers. Cette formation leur permet d'avancer le plus possible à moindre effort.
COUDERC : En effet, et c'est ainsi que la balle va jusqu'à Galthié, puis Dusautoir, pour qui c'est le premier ballon. Et ce dernier s'élance soudain à travers la défense ! Mais... les Dreamers ne sont-ils pas étrangement positionnés ??
GILARDI :
Ils dessinent à nouveau une lettre de l'alphabet, un « T » cette fois ! Mais à cause de cela, leur flanc gauche se voit moins gardé, et Dusautoir semble vouloir en tirer profit ...!COUDERC : Mais enfin, ces satanés indices prévalent-ils sur le match lui-même ?? Je trouve cette obsession pour cette énigme plutôt inappropriée, Thierry !
GILARDI : Et pourtant, vous ne pouvez pas nier que vous mourrez d'envie d'en connaître le fin mot ! C'est le fil rouge de cette retransmission, après tout !
COUDERC : Certes... Dans tous les cas, Dusautoir poursuit sa course, le ballon sous l'épaule, et tente une percée. Il se dirige pile vers l'emplacement du premier centre des Dreamers, qui va alors être chargé de l'arrêter ! Conscient de cette responsabilité, Cavendish Thomas se pré...
GILARDI : Une seconde ! Il ne s'agit pas de Thomas, le centre est une joueuse que l'on n'a pas encore aperçue, la numéro 21 de l'équipe, Littner !!
COUDERC : Comment se fait-il qu'elle se trouve sur la pelouse ?? Les Dreamers ont-ils procédé à un remplacement sans que nous, commentateurs d'exception, ne nous en rendions compte ?!
GILARDI : Aussi improbable que cela puisse paraître, il faut se rendre à l'évidence ! Quand Thomas a terminé ses dix minutes de sortie à cause de son carton jaune, ce n'est pas lui qui est revenu sur le terrain ! Littner en a profité pour prendre sa place dans la discrétion la plus complète !
COUDERC : Mais ce n'est pas possible, un changement est toujours annoncé, on ne peut pas en effectuer un sans que cela ne se voie !
GILARDI : Eh bien... à ce moment, nous étions plongés dans l'ambiance du match, et il est possible que cela nous ait échappé...
COUDERC : Voilà qui est indigne de notre professionnalisme ! Je ferai en sorte que cela ne se reproduise pas !
GILARDI : Cela serait préférable, en effet... En attendant, la jeune femme aux cheveux écarlates a l'air déterminée à faire bonne impression, et à stopper Dusautoir qui se rapproche sans peur d'elle ! Ce face à face oppose deux joueurs frais, nous assistons à Thierry Dusautoir contre Yôko Littner !!
COUDERC : Lancé à pleine vitesse, le Français ne voit pas la nécessité d'exécuter un crochet. À la place, il tend son bras horizontalement vers Littner, qui se prépare à le plaquer.
GILARDI : Un raffut ! Même face à une femme, il n'y va pas de main morte ! Sa main, au contraire, est ferme et prête à repousser son vis-à-vis. Elle se plaque alors sur le haut du torse de Littnet, bloquant ainsi son avancée...
COUDERC : Mais la nouvelle-venue a des ressources en réserve ! Elle se baisse soudain pour échapper à la prise du raffut, réalisant un mouvement à la Matrix. Puis elle envoie ses épaules en avant et percute de plein fouet les hanches de Dusautoir, le décollant du sol !
GILARDI : Le plaqueur de génie a trouvé son égale ...! Impuissant, Dusautoir jette un bref coup d’œil en arrière, cherchant un partenaire à qui donner la balle avant de chuter. Tel un sauveur, Wilkinson apparaît dans son champ de vision et reçoit aussitôt le ballon.
COUDERC : Toutefois, Littner ne se contente pas de stopper le troisième ligne français ! Pleine de hargne, elle s'est relevée en un éclair et bloque également la route au capitaine anglo-saxon ! Rapidement rejointe par Yamanaka et Roséo, les trois forment une barrière infranchissable !
GILARDI : Encerclé, Wilkinson se retrouve dans l'impossibilité de dégager la balle ! De plus, bloqué près de la ligne de touche, la pression de ses adversaires va finir par l'en faire sortir ! Va-t-il trouver un moyen de garder la possession de la balle ?
COUDERC : Trop tard ! Roséo vient de le plaquer aux jambes, le faisant trébucher et tomber au-delà de la ligne de touche. Le ballon est finalement récupéré par les Dreamers !
GILARDI : Ah là là... Wilki a su nous impressionner à deux reprises grâce à son drop à reculons et sa pénalité transformée à plus de cinquante mètres, mais il ne peut réussir à chaque fois ! Et malheureusement, il semble qu'il va céder sa place sur ce petit échec, qui n'est cependant pas ce qu'on retiendra de lui !
COUDERC : Évidemment que non, Thierry ! Comme lors de toutes ses sélections, il a aujourd'hui encore été exceptionnel, il peut se retirer avec fierté ! Et si les Legends perdent un atout de choix, ils en gagnent un autre, qui a en plus l'avantage d'être frais. Car l'individu qui le remplace, et qui reçoit au passage le brassard de capitaine, n'est autre que Daniel Carter !!
GILARDI : Un joueur d'exception également, dont le jeu au pied est redoutable ! Et le jeu au pied, à ce stade de la partie, est primordial ! Voulez-vous expliquer pourquoi, cher Roger ?
COUDERC : Avec plaisir ! Il n'y a qu'un point qui départage les deux équipes alors que nous entrons bientôt dans les quinze dernières minutes de la rencontre. Ce qui signifie qu'un simple drop ou une seule pénalité peut permettre aux Legends de passer devant leurs opposants ! C'est certainement ce que cherche à faire Steve Hansen, leur coach !
GILARDI : Précisément ! En ce qui concerne les Dreamers, leur mission est donc de conserver leur avance et même, si possible, de la conforter pour se mettre à l'abri. Conclusion : Carter est le moyen pour la Team of Legends de prendre l'avantage en drop ou en pénalité. Le Rugby Club Dreamers doit donc s'assurer de ne lui laisser aucun espace, tout en évitant absolument de commettre toute faute qui pourrait mener à une pénalité.
COUDERC : Votre capacité d'analyse s'améliore, Thierry ! Si vous continuez sur cette voie, vous n'aurez plus rien à m'envier !
GILARDI : Je suis flatté de vous entendre prononcer ces paroles, Roger !
COUDERC : Non mais en fait je le pense pas, hein. T'es inférieur à moi et tu le resteras toujours, connard.
GILARDI : Ho ho ho ! La fin approche et l'on commence à dire de plus en plus d'absurdités ! Alors continuons juste de commenter le match, ça te va, enfoiré ?
COUDERC : Ça me va très bien. Pour en revenir à nos moutons, les deux équipes sont maintenant en formation pour jouer la touche. Le demi de mêlée du Rugby Club Dreamers, Roséo, en est à nouveau à la base. Et la configuration des réceptionnistes est la même que lors de la première touche, c'est-à-dire Legroyoshi, Dracule et Clive.
GILARDI : Dans cette même situation, le ballon avait été envoyé au joueur le plus devant, Rolfe Legroyoshi, car il s'agissait du choix le plus inattendu. Mais nous avons des raisons de croire qu'une même stratégie ne fonctionnera pas deux fois.
COUDERC : C'est vrai. D'un autre côté, la décision pourrait tout aussi bien se porter sur le dinosaure si les Dreamers usent d'une psychologie inversée !
GILARDI : Mais s'ils vont jusqu'à penser à une psychologie doublement inversée, ils l'enverront dans ce cas à quelqu'un d'autre !
COUDERC : Thierry... vous êtes au courant qu'on peut aller loin, comme ça ...?
GILARDI : Certes... Observons juste ce qui va se produire, et nous nous efforcerons de commenter en simultané.
COUDERC : Voilà qui me semble plus raisonnable. Roséo à la tête blasée vient de lancer le ballon, d'une manière souple et parfaitement maîtrisée. Chacune des deux équipes s'attelle alors à soulever le joueur qu'elle a choisi. Il s'agit de Dracule, se trouvant au milieu, pour les Dreamers...
GILARDI : Et de O'Connel pour les Legends, qui lui, est au premier rang ! Le deuxième ligne irlandais est décidément le favori en ce qui concerne la réception des passes. Et avec raison, il s'envole tellement haut qu'il semble capable d'intercepter la balle ! Et cet enjeu nous ouvre un nouveau duel ...!
COUDERC : Comment ça ? Un duel entre O'Connel et Dracule ? Mais comment Dracule pourrait-il faire quoi que ce soit, vu qu'il se trouve derrière son adversaire ? Il ne peut qu'espérer que ce dernier va malencontreusement manquer le ballon !
GILARDI : Détrompez-vous, Roger ! Le duel dont je parlais ne met pas en scène ces deux protagonistes. Il s'agit de Paul O'Connel contre Dan D. Roséo !! Cela peut paraître étrange, car ce dernier n'a plus aucune emprise sur la balle et il pourrait sembler que la capacité de O'Connel de l'attraper ou de le louper ne dépend pas de lui. Pourtant, c'est une erreur ! En effet, les demis de mêlée expérimentés ont quelquefois une façon spéciale de lancer le ballon, qu'ils développent pour que seuls leurs coéquipiers soient capables de le rattraper. Nous allons donc voir si, en tant que joueur de haut niveau, Roséo a usé ou non d'une telle technique.
COUDERC : C'est quelque chose qui ne faisait absolument pas partie des considérations du rugby de mon temps ! Voilà qui est fascinant ! Cependant, même si cette technique existe, n'oubliez pas que O'Connel est lui aussi un athlète de renom ! Il fera tout pour la contrer !
GILARDI : Ce qui va advenir va être dévoilé immédiatement. O'Connel est sur le point de saisir l'ovale, un grand sourire accroché aux lèvres. Ses mains se referment sur la surface du ballon, mais elles glissent soudain ! La balle... la balle a effectué une rotation de telle sorte qu'elle s'est échappée de la prise de l'Irlandais, le rendant incapable de couper sa trajectoire ...!
COUDERC : Incroyable ! Vous aviez donc raison, Thierry ! Le numéro 9 des Dreamers a bel et bien jeté le ballon en anticipant une interception adverse ! Ainsi, il a donné à la balle un mouvement rotatif particulier pour le rendre extrêmement difficile à saisir ! Il s'agit là d'un exploit technique mêlé à un génie stratégique !
GILARDI : Et finalement, Dracule peut attraper le ballon qui lui était destiné, en toute tranquillité ! Il retombe agilement sur ses pieds et tourne le dos au camp adverse, se plaçant sur ses appuis. Ses partenaires, comprenant son message, se lancent vers lui et entament un Maul avec leurs opposants.
COUDERC : En plus de Dracule, Clive et Lucci qui y sont déjà, Dragmire et Aotsuki s'y joignent. Du côté des Legends, Wood, Leonard, Mc Caw, Dusautoir et Hari sont dans la bataille. Du Randt et Merle s'apprêtent à venir leur prêter main forte, afin de repousser le bloc adverse.
GILARDI : Et c'est ce qu'ils font, avec brio ! Seulement, je ne vois plus la balle dans les bras de Dracule, où est-elle passée ??
COUDERC : Oh, ce n'est pas un Maul, Thierry ! Regardez, le ballon se trouve à terre, manœuvrée vers la sortie du bloc par Lucci ! Ce qui se dispute en ce moment au milieu du terrain est un Ruck ! D'un coup de pied vers le haut, le talonneur des Dreamers envoie la balle vers Yamanaka, qui profite du grand nombre de joueurs dans le Ruck pour partir vers l'avant.
GILARDI : Mais Richie Mc Caw a vu venir cette percée ! Déterminé à plaquer la blonde, il se dégage du Ruck et plonge vers elle avec agressivité. Mais l'ailière, vive comme une ombre, et fuyante comme la danseuse qu'elle est, lui file entre les doigts. Et il se retrouve à saisir accidentellement sa queue de cheval !
COUDERC : Yamanaka est stoppée net dans sa course et tombe à la renverse. Évidemment, un tel geste de la part de Mc Caw, bien qu'involontaire, n'est pas acceptable. L'arbitre intervient expressément et siffle une faute en faveur du Rugby Club Dreamers, avant d'asséner un carton jaune à Mc Caw pour avoir empêché une action dangereuse.
GILARDI : Et il semble bien que le troisième ligne néo-zélandais, tout peiné qu'il soit, va devoir assister à la fin du match depuis le banc, car il ne reste guère plus de dix minutes à jouer dans cette partie !
COUDERC : Je dirais même plus ! Dans cette partie il ne reste guère plus de dix minutes à jouer !
GILARDI : En effet, Dupond. Euh, je veux dire, Roger. La faute va être jouée par Schieffer, qui va donc la tirer en pénaltouche je suppose...
COUDERC : Eh bien, non ! Il vient de placer le plot pour faire tenir le ballon, il semble donc qu'il veuille tenter de marquer la pénalité ...!
GILARDI : Mais il se trouve à plus de cinquante mètres des barres ! Attendez un instant, cela me rappelle quelque chose... N'est-ce pas exactement la même pénalité que Wilkinson a réussi à transformer plus tôt dans la rencontre ? Après avoir tenté le même drop, il veut donc tenter la même pénalité ? Apparemment, il désire clairement défier le capitaine anglais en imitant chacune de ses prouesses !
COUDERC : Il n'a pas pu égaler la légende lors du drop à reculons, parviendra-t-il à se rattraper grâce à cette pénalité longue distance ? Plus que jamais concentré, l'ouvreur s'élance et frappe la balle. Quelle magnifique coup de pied ! Il s'est admirablement penché en arrière au moment du coup, tout en gardant un équilibre parfait ! Le ballon plane calmement vers les barres, à peine poussé par le vent au travers duquel il semble se faufiler...
GILARDI : Et savez-vous où il se faufile également ...? Pile entre les deux barres pour une pénalité d'anthologie !! Cette fois, Schieffer a prouvé qu'il pouvait être au niveau de son maître Wilki, et propulse dans le même temps son équipe dans les quatre point d'avance ! Car le score est à présent de six à dix pour les Dreamers !
COUDERC : Cette transformation est on ne peut plus importante, Thierry, car elle met les Dreamers à l'abri de se faire doubler pour un simple drop ou une pénalité ! À présent, deux drops ou deux pénalités sont nécessaires aux Legends pour passer devant, ou un essai. Et vu que nous sommes déjà entrés dans les dix dernières minutes de la rencontre, l'un comme l'autre sera ardu !
GILARDI : Sans oublier que les Legends ne sont maintenant plus que quatorze sur la pelouse ! La victoire serait-elle en train de choisir le camp des Dreamers ...? Oups, excusez mon interruption, je m'aperçois qu'une nouvelle lettre se forme sur le terrain...
COUDERC :
Cela faisait un petit moment, dites donc ! Et cette fois, il s'agit d'un rond parfait. Autrement dit, un « O » ! Je vous laisse le noter pendant que Keith Wood joue l'engagement sur ses adversaires. La balle est tirée loin, et atterrit dans les bras de Bonney. Celle-ci s'avance, suivie de près par Littner qui la soutient.GILARDI : On dirait que ces deux jeunes femmes font les mêmes mouvements en parallèle... Comme si une même personne les contrôlait toutes deux...
COUDERC : C'est assez particulier, en effet... Bref, une passe transmet le ballon à Schieffer, qui, usant de la vision du jeu propre aux demi-d'ouvertures, envoie directement une transversale vers Aotsuki, qui s'était démarqué. Ayant pressenti ce geste, Galthié se rue sur le numéro 7 des Dreamers, prévoyant de le plaquer au moment où il recevra le ballon.
GILARDI : Il ne compte pas lui laisser le temps de réfléchir à quoi faire, afin de récupérer la possession de la balle le plus rapidement possible et d'aller marquer des points.
COUDERC : Le ballon arrive à portée d'Aotsuki, qui se voit aussitôt pressé par Galthié. Et là, dans un magnifique mouvement de bras, il accompagne la balle dans sa chute, le recevant sur sa paume sans véritablement l'attraper. Il utilise alors l'inertie du ballon pour le faire passer dans son dos et le lancer derrière lui !
GILARDI : Dans le jargon du rugby, cela s'intitule une chistera ! Et Aotsuki l'a effectuée d'une façon si fluide et si rapide que Galthié n'a pas eu le temps d'entraver ses mouvements. Lorsque le demi de mêlée français plaque finalement son vis-à-vis, le ballon l'a déjà quitté, si bien qu'il se retrouve inévitablement à commettre une faute !
COUDERC : Un plaquage sans ballon, effectivement ! Aotsuki a brillamment réussi à se débarrasser de la balle juste avant de se faire plaquer, ledit plaquage devient non-réglementaire !
GILARDI : En conséquence, une mêlée va maintenant se jouer, à une quarantaine de mètres de la ligne d'en-but des Dreamers. Ces derniers, qui possèdent l'introduction, ont juste besoin de conserver la balle pour empêcher leurs adversaires de les menacer d'un attaque périlleuse.
COUDERC : Cependant, on remarque que la fatigue commence à se faire sentir ! Les Dreamers, certainement moins habitués au sport, montrent des signes d’essoufflement alors que les Legends, plus endurants, ont l'air plus énergiques. Et il se pourrait que cela influe sur la mêlée, qui est toujours très physique pour les deux packs.
GILARDI : Il est vrai que cette épreuve risque d'éprouver durement les huit joueurs du pack des Dreamers. Mais la mêlée a tout de même été sifflée en leur faveur, ils disposent donc d'un avantage ! Dans tous les cas, les athlètes se sont mis en place, se préparant psychologiquement à la souffrance qu'ils vont endurer. Roséo est immobile sur le côté, le ballon dans les mains. Au rythme des ordres de Sir Damon, les joueurs se figent, fléchissent, et se lancent !
COUDERC : Le choc a arraché une harmonie de cris. Les forces des joueurs semblent s'annuler pour le moment, comme la mêlée fait du surplace. C'est maintenant à Roséo d'introduire le ballon, en le faisant rouler du côté de ses partenaires, dans l'espoir de le récupérer. Mais au même moment, les Legends se mettent à pousser les épaules de leurs adversaires ! Telle une explosion de puissance, ils emportent le groupe plusieurs mètres en arrière, laissant impuissants les pauvres membres du Rugby Club Dreamers !
GILARDI : Vous aviez vu juste une fois encore, Roger ! Les Dreamers, exténués, ne semblent plus à même de rivaliser physiquement face aux Legends ! Ces derniers, réalisant l'exploit de ravir le ballon lors d'une mêlée, savent alors que c'est l'instant idéal pour mener une offensive dévastatrice ! Le mental de leurs adversaires doit être légèrement secoué après avoir ainsi perdu la possession du ballon, c'est donc le moment ou jamais !
COUDERC : Rapidement dégagée, la balle est envoyée en un éclair sur l'aile par Williams ! Carter, excentré de sa position d'origine, la réceptionne et entame alors un sprint vers la ligne d'en-but adverse ! Le néo-zélandais, fier de sa vitesse, file dans le dos de Bonney, et jouit même de la chance de voir Shadow, le seul qui puisse encore le stopper, se trouver complètement de l'autre côté du terrain !
GILARDI : Il a littéralement la voie libre devant lui ! Le moment de la remontée de la Team of Legends serait-il arrivé ? Si cet essai est marqué, l'équipe passera devant sa concurrente et il sera ensuite plus que difficile d'inverser la tendance !!
COUDERC : À moins que... regardez, un joueur des Dreamers n'a pas abandonné ! Dragneel, le second centre, s'est furieusement lancé à la poursuite de Carter ! Ses yeux semblent vides, comme si la volonté de le stopper avait pris le dessus sur tout le reste ...!
GILARDI : Je crois savoir pourquoi il tient tant à ne pas accepter de le laisser passer... Rappelez-vous, Roger, lui et Bonney se sont faits berner à deux reprises par Shane Williams, qui a percé deux fois la défense à travers leurs positions. Je suppose qu'à ce moment crucial de la rencontre, il a décidé de ne pas se faire avoir une troisième fois, et de stopper Carter coûte que coûte ! Et j'ajouterai que cette détermination mérite d'être hissée au rang de duel ! Quelle sera l'issue de ce face à face sur lequel le match entier repose ?! C'est Daniel Carter contre Natsu Dragneel !!
COUDERC : Ce que vous avez conjecturé est très probable, Thierry. Néanmoins, en dépit de toute la bonne volonté de Dragneel, est-il réellement capable d'arrêter Carter ? Certes, il le suit de très près, mais le plaquer et le stopper demeure une tâche extrêmement délicate !
GILARDI : Faisons confiance à ses capacités ! Toujours en train de courir l'un derrière l'autre comme des dératés, les deux joueurs se rapprochent de la ligne... S'il veut vraiment avoir une chance d'empêcher l'essai, Dragneel n'a pas le choix. Il doit agir... maintenant !!
COUDERC : Et justement, le voilà qui bondit en avant ! Mais il ne cherche pas à saisir Carter, que ce soit sa taille ou ses jambes ! À vrai dire, il s'est élancé en tendant seulement le bras droit, visant son pied ...!
GILARDI : Il tente le tout pour le tout ! S'il parvient à entraver la course mécanique des jambes de Carter en lui tapant le talon, dans un geste qu'on appelle la cuillère, son adversaire chutera devant ses yeux et perdra son élan ! C'est une décision assez dangereuse et plutôt ardue, mais c'est également la seule alternative !
COUDERC : Le bras souple, Dragneel s'efforce de s'étirer le plus possible pour atteindre l'arrière du pied de Carter. Victoire, il l'effleure de ses doigts ! Il fronce alors les sourcils, et dans un cri de déchaînement, tend les muscles de son bras et frappe violemment le talon de gauche à droite !
GILARDI : La réaction est immédiate ! La jambe de Carter se déporte sur le côté, venant s'entrechoquer avec l'autre, et le joueur, ne réalisant pas ce qui lui arrive, effectue un vol plané impressionnant ! Alors qu'il chute à terre, surmontant la douleur qui lui monte dans les membres, il se rend compte que la balle lui a faussé compagnie dans le feu de l'action !
COUDERC : Elle a glissé hors de ses bras au moment de sa chute, et s'est faite éjecter en l'air ! C'est Schieffer, qui avait suivi de loin l'acte désespéré de son coéquipier Dragneel, qui la récupère, mais le danger est encore loin d'être repoussé ! En un claquement de doigt, l'ouvreur à la peau blanchâtre est encerclé de trois joueurs adverses, qui bloquent son horizon !
GILARDI : Il se retrouve pressé contre la ligne de touche, à une poignée de mètres de sa ligne d'en-but ! S'il ne parvient pas à dégager le ballon rapidement, il va cruellement provoquer une touche qui risque d'être fatale à son équipe ...!
COUDERC : Thierry, cette situation est celle qui a précédé le remplacement de Wilkinson, lorsqu'il s'est fait sortir en touche ! Ne serait-ce pas là l'occasion de mettre un terme définitif au duel entre Wilkinson et Schieffer ? Tous deux ont réussi la pénalité à plus de cinquante mètres, alors que seul le capitaine emblématique a transformé le drop à reculons. Ainsi, si Schieffer veut obtenir le match nul et ne pas souffrir d'une défaite face au géant anglais, il doit réussir là où ce dernier a échoué. Il doit réussir à surmonter l'encerclement de trois joueurs !
GILARDI : Votre sens de la mise en scène me plaît, Roger ! Il s'agit donc d'un double-enjeu pour Schieffer, la victoire de son équipe et son match nul personnel contre Wilkinson !
COUDERC : Les trois joueurs qui entourent l'ouvreur des Dreamers sont Jason Leonard, Thierry Dusautoir et Bryan O'Driscoll. En d'autres termes, ils sont tous trois plus grands que lui, si bien qu'on ne le voit même plus au milieu de cette forêt de têtes !
GILARDI : Mais... le ballon vient d'être lancé en l'air ? Ne pouvant le dégager sur les côtés, Schieffer a décidé de le lancer vers le haut ? Mais il va être incapable de le rattraper, encerclé par trois colosses plus grands que lui ! Que prévoit-il de faire ??
COUDERC : Les trois Legends bondissent simultanément pour saisir le ballon, arrivé à son point culminant. Soudain, un pied les dépasse. Il s'agit du pied de Schieffer, qui se hisse parmi les bras de ses adversaires ! Il a effectué un salto en l'air, et s'apprête à frapper le ballon du pied, devançant de vitesse et même de hauteur ses opposants ...!
GILARDI : Quelle idée complètement folle ! Même Wilki n'aurait jamais pensé à exécuter une reprise de volée en retourné, sans parler de la probabilité de la réussir ! Et pourtant... il me semble que nous assistons à un miracle... Schieffer vient de frapper du coup du pied la balle, au nez et à la barbe de ses adversaires directs, et de l'envoyer dans le camp des Legends !
COUDERC : Contre toute attente, et dans une situation désespérée, il a réussi à écarter le danger, préservant ainsi la précieuse avance de son équipe !! Décidément ce match, et particulièrement cet instant, resteront gravé dans les mémoires !
GILARDI : Et le pire, c'est que la tension n'est pas encore prête de retomber ! La balle, réceptionnée par Jonah Lomu dans son propre camp, est toujours en possession des Legends. Ils ont donc toujours la possibilité de revenir au score !
COUDERC : Lomu, concentré, reste quelques instants immobile afin d'observer ses adversaires. Là, la sirène signalant les quatre-vingt minutes retentit. Le temps est écoulé, les Legends perdent six à dix mais possèdent la balle. Il leur reste donc une ultime offensive. Une dernière attaque qui décidera du vainqueur de la rencontre.
GILARDI :
Le suspense est à son maximum, Roger !! Et au milieu de tout cela, j'aperçois ce qui est certainement le dernier indice qui nous sera donné... un « N » à nouveau ! Je le note rapidement, accompagné du timer, et je reviens sur l'incroyable conclusion qui se profile !COUDERC : Lomu s'est finalement élancé, démarrant la machine de muscles et d'os que son corps représente. Il court droit devant, décidé à marquer lui-même l'essai dont son équipe a besoin. Il se heurte en premier à Yamanaka, qui est auparavant parvenue à lui chiper le ballon. Mais il a retenu la leçon et le serre fermement contre son torse, ne laissant aucune chance à la blonde de réitérer ce joli geste.
GILARDI : Après Yamanaka, c'est au tour de Littner et de Winter de venir affaiblir le monstre en approche. Les Legends, conscients que de lui dépend le résultat final du match, viennent à leur tour lui venir en aide. O'Driscoll et Giteau d'abord, ensuite suivis de Merle et de Carter.
COUDERC : Et bientôt, tous les joueurs des deux équipes se trouvent dans la mêlée, poussant de toutes leurs forces dans leurs directions respectives. Tout comme il a débuté, il semble que ce match va se terminer sur un Maul, qui décidera de l'équipe qui recevra les honneurs !
GILARDI : Un Maul en effet, mais pas n'importe lequel ! Il s'agit sûrement du plus gros Maul de toute l'histoire du rugby, Roger, mené sans exception par tous les membres des deux équipes ! Par des joueurs qui viennent de disputer le match le plus rude et le plus riche en rebondissements de toute leur vie ! Et au terme de cette terrible confrontation, c'est finalement une ultime épreuve de force qui va venir départager deux équipes qui nous auront offert un spectacle unique ...!
COUDERC : Votre voix porte un ton de résignation, Thierry... Vous parlez comme si la rencontre était déjà terminée !
Eh bien, c'est presque le cas ! Après cette dernière action, le coup de sifflet final sera donné, et la GILARDI : beauté de ce match sera derrière nous ! C'est pourquoi il faut profiter au mieux de ce moment privilégié, ce moment de suspense pur, ce moment qui nous rappelle les vraies valeurs du rugby ! Nous avons assisté à plusieurs duels entre les joueurs des deux sélections, mais cette fois ce sont les sélections qui s'affrontent. Cette fois, je suis fier de dire que le duel qui nous occupe et la Team of Legends contre le Rugby Club Dreamers !!
COUDERC : Notre responsabilité de journalistes est de savoir faire ressentir les événements aux spectateurs dans toute leur intensité... et j'accomplirai ce devoir. Le Maul bat toujours son plein, avançant péniblement mais régulièrement vers la ligne d'en-but des Dreamers. Ces derniers ont toujours le désavantage de la fatigue, qui encore une fois est un fardeau dont les conséquences sont visibles !
GILARDI : Cependant, les Dreamers savent qu'il leur suffit de tenir le coup pour cette action seulement, et tous leurs efforts seront alors récompensés d'une victoire enivrante ! Galvanisés par cette pensée, ils se surpassent soudain et parviennent à stopper leur recul. Le Maul est à présent immobilisé à une dizaine de mètres de leur ligne.
COUDERC : Si personne ne cherche à dégager la balle, les choses risquent simplement de rester comme telles. Shadow, le capitaine, quitte alors ses partenaires et, contournant le groupe, s'apprête à se lancer sur Lomu pour lui enlever le ballon. Mais... à sa grande surprise, celui qu'on surnomme l'extraterrestre ne le possède plus !!
GILARDI : Tous les regards se tournent derrière le Maul, d'où trois joueurs se sont échappés ! Les trois, que sont Williams, Littner et Schieffer sont allongés au-delà de la ligne d'en-but, à proximité du ballon, qui demeure immuable au sol.
COUDERC : Avez-vous vu ce qu'il s'est passé, Thierry ? Comment ces trois joueurs se sont-ils retrouvés là-bas, quand se sont-ils extirpés du Maul ? Et la question la plus importante : Williams a-t-il aplati la balle ??
GILARDI : Je n'en ai aucune idée, Roger, et l'arbitre ne semble pas en avoir vu plus que vous ou moi... Il demande alors l'arbitrage vidéo, alors que le Maul se dissocie. L'action s'est jouée si rapidement que personne n'a réellement vu ce qu'il s'est produit, mais il est trop tard maintenant pour changer quoi que ce soit. Les joueurs n'ont plus aucune emprise sur les événements, ils vont devoir regarder le ralenti, dans l'espoir d'un essai pour les Legends, dans l'attente d'un sauvetage pour les Dreamers.
COUDERC : Les images apparaissent sur l'écran géant. Les yeux du stade tout entier sont fixés sur ces pixels, qui vont révéler la vérité ainsi que le dénouement du match. Sur l'écran, Lomu est encore en possession de la balle. Soudain, une paire de mains la lui vole et s'élance vers l'avant, avec une rapidité et une discrétion qui ne peut provenir que d'un joueur : Shane Williams. Ce dernier se dirige vers l'en-but adverse, penché sur ses appuis pour ne pas se faire remarquer. Cependant, deux individus au regard perçant l'observent néanmoins : Yôko Littner et Ulquiorra Schieffer. Les deux l'ont vu opérer, et se lancent à sa poursuite pour l'empêcher d'aplatir... Allez les petits, allez...
GILARDI : Poussés par l'importance de leur réussite, ils parviennent à rattraper Williams juste devant la ligne. Et là, sur le gigantesque écran, les choses se déroulent d'une lenteur extrême. Schieffer saisit les jambes du Gallois, le faisant perdre l'équilibre et chuter en avant. Mais il effectue un minuscule bond qui lui permet de glaner quelques centimètres, suffisants pour avoir la ligne au niveau de son poitrail. Il serre alors le ballon contre son torse, s'apprêtant à l'aplatir de façon ferme et déterminée. À ce moment, Littner l'a devancé et envoie sa main sous son corps, afin d'établir une barrière entre le ballon et le sol. Elle réussit à plaquer sa paume contre la balle, prévenant son aplatissement. Mais l'élan de Williams, ajouté à la masse de son corps qui chute, exerce une force que son bras ne peut supporter. Et sa main glisse, âprement, irréversiblement, jusqu'à être éjectée sur le côté.
Les Dreamers, observant la fin de l'enregistrement, ferment les yeux.
L'arbitre lève le bras, et valide l'essai.
La rencontre est terminée.
Score final : onze à dix.
Victoire des Legends.
COUDERC : Eh bien ! Que de sensations fortes en commentant cet incroyable macth ! Il s'avère que de façon individuelle, les Dreamers ont sans doute été légèrement supérieurs, comme le suggèrent les fameux duels qu'ils ont presque tous remportés. Cependant, d'un point de vue collectif, les Legends se trouvaient un cran au-dessus d'eux, si bien que l'ultime face à face, qui opposait les deux équipes en entier, s'est achevé sur leur victoire.
GILARDI : En conclusion, les deux équipes ont montré un jeu époustouflant ce soir, et je pense qu'elles sauront toutes deux reconnaître le mérite qui va à leurs adversaires. Gagnants comme perdants, ils nous ont offert un spectacle exceptionnel, et leur prestation était digne des plus grands.
COUDERC : Ce match est maintenant définitivement fini, Thierry, mais il nous reste encore une chose à éclaircir, si je ne m'abuse ?
GILARDI : Tout à fait, Roger ! Il nous reste ce qui a été le fil rouge inattendu de cette retransmission, j'ai nommé l'énigme qui nous a été soumise ! Voici ci-dessous un récapitulatif des indices qui nous ont été donnés, avec le moment du match où ils sont apparus. À partir de cette suite de lettres, nous devons retrouver un mot, qui sera sans doute lié à l'origine du Rugby Club Dreamers. Spécialement pour vous, spectateurs, les répliques renvoyant aux lettres aperçues ont été mises en
couleur. Certaines d'entre elles recèlent également quelques indices supplémentaires. Vous pouvez donc essayer de trouver la solution par vous-même !
- Récapitulatif du code:
COUDERC : Très joli post-it, Thierry. Bien ! À partir de maintenant, nous allons nous-mêmes commencer à réfléchir à ce mystère, et possiblement le résoudre. Si vous n'avez pas trouvé la solution et que vous ne désirez pas la connaître depuis quelqu'un d'autre, je vous conseille de ne pas lire ce qui suit et de continuer à réfléchir. Vous êtes prévenus !
GILARDI : C'est tout de même étrange de dire ça, vous ne trouvez pas Roger ? C'est comme si notre retransmission était un texte ! Haha, n'importe quoi ! Sinon, concernant l'énigme, je ne voudrais pas m'imposer mais je pense l'avoir d'ores et déjà résolue...
COUDERC : Êtes-vous sérieux, Thierry ?? Vous allez donc savoir nous montrer comment aborder ce mystère ?
GILARDI : En effet, car sans vouloir me vanter, j'ai été un élève de l'école nationale des détectives quand j'étais petit. Même si cela date d'il y a plusieurs décennies, je pense avoir gardé les réflexes d'un bon enquêteur et l'esprit de déduction qui en découle.
COUDERC : Vous avez été à l'école Teitan ?? Impressionnant ! Je meurs de hâte de vous voir débuter votre raisonnement !
GILARDI : Je ferai de mon mieux pour ne pas décevoir vos attentes, Shinichi. Euh, je veux dire, Roger. Tout d'abord, on peut remarquer que tous les moments où l'un des indices est apparu sont des multiples de huit. Et je pense que le W, qui a été noté autour des dix minutes, s'est en réalité formé à huit minutes précises. Ce qui suggère que le timing n'a pas été laissé au hasard, et que les lettres étaient censés se dévoiler toutes les huit minutes.
COUDERC : Pourtant, il s'est écoulé seize minutes entre le G et le N, et autant entre le T et le O !
GILARDI : Justement, ne trouvez-vous pas étrange que pile seize minutes les séparent ? Si vous voulez mon avis, deux lettres sont bel et bien apparues à la trente-deuxième minute ainsi qu'à soixante-quatrième, mais nous les avons tout simplement manquées.
COUDERC : Impossible. Personnellement, j'ai gardé ces indices en tête tout au long du match. Bien qu'étant fasciné par ce qui se passait sur le terrain, je suis resté extrêmement concentré sur ces lettres et à aucun moment je n'ai baissé ma garde. De plus, vous étiez à l'affût également, il me paraît donc très improbable que nous ayons manqué deux lettres.
GILARDI : Certes, mais tiendriez-vous le même discours si... ces deux lettres avaient été invisibles ?
COUDERC : Sauf votre respect, Thierry, je ne vous suis plus...
GILARDI : Reprenons depuis le début. Le code dont nous disposons est : WAGNVTON. Cela ne ressemble à aucun mot de la langue française, il est donc approprié d'imaginer que des lettres manquent. Et, dans l'idéal, des voyelles. N'y a-t-il pas une voyelle qu'il aurait été très difficile d'apercevoir dans une formation de rugby ...?
COUDERC : Est-ce possible ? Le « I » ! Selon la manière dont on l'écrit, il peut ressembler au chiffre 1 en écriture romaine, ou...
GILARDI : C'est cela ! Ou à une simple barre verticale ! Et dans ce dernier cas, il devient alors tout à fait compréhensible que nous ne l'ayons pas relevé dans le feu de l'action ! Après tout, si nous comptions toutes les fois où les joueurs forment une espèce de ligne, nous n'aurions pas fini...
COUDERC : C'est donc ce que vous vouliez dire par ''invisible'' ! Je comprends à présent !
GILARDI : C'est tout le brio des détectives que d'affirmer des choses improbables, qui deviennent évidentes dès lors que l'on change de point de vue. Cela nous permet donc de compléter quelque peu notre mot codé. En ajoutant un I à la trente-deuxième minute et un autre à la soixante-quatrième, cela donne : WAGINVTION. L'énigme se délie peu à peu, n'est-ce pas ?
COUDERC : Si vous le dites... Pour ma part, je ne vois qu'un code plus long à vrai dire...
GILARDI : Si vous prenez du recul, vous devriez pourtant être à même de la voir ! Mais qu'importe, je continue ma démonstration. Maintenant que nous en sommes arrivés là, il nous faut user de la logique. À qui cette énigme était-elle destinée ?
COUDERC : Eh bien, au grand public je suppose...
GILARDI : Oui, elle a été faite pour être connue de tous et était donc destinée aux médias. Mais qui donc sont les représentants des médias dans ce stade ?
COUDERC : Nous, bien sûr ! Les commentateurs !
GILARDI : Précisément ! Mais vous ne nierez pas que cette rencontre était une rencontre de légende, des journalistes du monde entier se sont donc rassemblés ici pour le vivre et le faire vivre aux citoyens de leur pays. On est donc en droit de penser que le mot cherché doit être écrit en anglais, de façon à être compris du plus grand nombre !
COUDERC : Je parle anglais tout à fait couramment, pourtant je peux vous assurer qu'aucun terme ne ressemble à cette bouillie de ''WAGINVTION'' !
GILARDI : C'est parce que vous ne prenez pas de recul, une fois de plus ! Les journalistes ont été si nombreux aujourd'hui que certains ont dû se placer de l'autre côté du terrain, en face de nous. Demandez-vous alors ce qu'ils ont dû voir de leur point de vue.
COUDERC : Eh bien... je pense que... ils ont dû apercevoir les lettres à l'envers, mais à part ça je ne comprends vraiment pas ce...
GILARDI : Mais il n'y a rien d'autre à comprendre, Roger ! Pourquoi ont-ils donc aperçu les lettres à l'envers et pas nous ? Et si ces lettres n'avaient pas été formées que dans un seul sens, mais bien dans les deux ?
COUDERC : Vous êtes en train de dire que toutes les lettres que nous avons notées sont placées à l'envers ? Mais j'ai beau les lire dans l'autre sens, cela ne m'aide pas plus !
GILARDI : Je suis seulement en train de dire que certaines de ces lettres sont à l'envers. Par exemple, ne trouvez-vous pas gênant la succession des trois consonnes N, V et T ? En anglais, aucun mot ne possède ces trois lettres à la suite ! Sauf si, en réalité, le V est à l'envers !
COUDERC : J'ai conscience que vous vous donnez beaucoup de ma, Thierry, mais un V à l'envers ne ressemble à rien du tout...
GILARDI : Essayez de vous rappeler, Roger... Au moment où ce V est apparu, l'équipe des Dreamers ne se trouvait-elle pas dans une phase particulière ...?
COUDERC : Eh bien... oh mon dieu ! C'était le moment où Cavendish Thomas avait reçu un carton jaune !
GILARDI : Bingo ! Il leur manquait un joueur, en conséquence ils n'ont pu former la barre centrale de la lettre, mais ce qu'il voulait transmettre à cet instant n'était pas un V, c'était bel et bien un A !! Et maintenant, il ne nous reste plus qu'à retourner une autre lettre pour qu'elle en devienne une différente...
COUDERC : Le W, qui est un M à l'envers !
GILARDI : Exactement, vous commencez à acquérir l'esprit d'un vrai détective ! Avec le V qui devient un A et le W qui se transforme en M, le code est alors bien plus translucide : MAGINATION. Il ne reste plus qu'un dernier I à ajouter au tout début du mot, qui est probablement apparu au moment même du coup d'envoi sans que nous le remarquions, et ce pour les mêmes raisons que précédemment ...!
COUDERC : Imagination ! C'est ce mot que le code voulait transmettre ! Par contre, je suis désolé mais je ne sais pas ce qu'il signifie... vous pouvez m'éclairer, Thierry ?
GILARDI : Hein ? De quoi parlez-vous ??
COUDERC : Eh bien oui, quoi ! Vous avez prouvé qu'il s'agissait d'un terme anglais, mais je dois avouer que je ne connais pas tous les mots compliqués de cette langue...
GILARDI : Vous vous moquez de moi ? Vous avez dit que vous la parliez couramment ! Et quand bien même ce n'est pas le cas, vous ne devriez pas avoir besoin de moi pour vous le traduire !
COUDERC : Dites donc ! Je suis votre aîné, tout de même ! Un peu de respect et de considération, je vous prie ! Et dites-moi ce que ce mot veut dire en français !
GILARDI : Euh... ok... ça veut dire ''imagination''.
COUDERC : Oh, je vois ! Dans tous les cas je suis très fier d'avoir trouvé la solution de ce code, mais cette énigme n'avait-elle pas pour but de révéler d'où venaient les joueurs du Rugby Club Dreamers, à la base ? Il nous faut encore faire le lien entre ce terme et leur provenance !
SIR DAMON : Le lien est pourtant flagrant, monsieur Couderc. Cela signifie simplement qu'ils sont le produit de l'imagination.
GILARDI : Oh, monsieur l'arbitre ! Vous avez réalisé un très beau match, félicitations ! Mais que diable faites-vous dans notre cabine ?
SIR DAMON : Je viens vous apporter les informations complémentaires dont vous avez besoin. Vous avez réussi à déchiffrer le code, et pour cela je vous félicite. Mais il reste encore une question que vous pourriez avoir envie de poser...
COUDERC : En effet... Si ces sportifs sont des créations de l'imagination, qui les as inventés dans ce cas ?
SIR DAMON : Vous mettez le doigt sur la chose. Ces individus, aussi singuliers, égocentriques et déments puissent-ils être, sont tous nés de l'imaginaire d'une seule et même personne. Et cette personne, justement, c'est moi.
GILARDI : Vraiment ?! Mais qui êtes-vous réellement ?
SIR DAMON : Moi ? Pour être honnête, je ne suis pas exactement réel non plus. La vérité est que je suis un symbole. Un symbole composé d'une multitude de flux, qui ont été délibérément placés en moi pour y grandir. Certains y sont actifs tous les jours, d'autres y sont plus calmes et plus discrets. En fait, je représente beaucoup de choses. La liberté, la progression, le désir créatif, l'expression des loisirs, mais je suis avant tout un toit sous lequel les passions se partagent. Je ne suis qu'une simple cohésion qui est peu à peu en train de gonfler, et de se transformer en une véritable communauté. Je suis abstrait, car je suis l'addition de dizaines d'imaginaires qui se croisent, se parlent et se répondent. Oui, à l'instar des joueurs qui vous ont offert un spectacle d'exception ce soir, je ne suis qu'une matérialisation de l'imagination...
COUDERC : En parlant des joueurs des Dreamers, vous avez l'air de bien les aimer, mais ils ont tout de même perdu. Comment expliquez-vous cette défaite, alors qu'ils ont mené durant pratiquement tout le match ?
SIR DAMON : Ils n'avaient pas besoin de gagner la rencontre. Le simple fait de la disputer, se supportant les uns les autres comme une véritable équipe, était déjà une victoire suffisante.
GILARDI : Euh... tout ce que vous dites a l'air poignant, mais on n'y comprend pas grand chose en fait...
SIR DAMON : C'est normal, vous n'êtes pas ceux qui sont censés saisir ce que je suis en train de raconter. Ceux qui sont concernés se trouvent dans un autre monde, bien plus concret. Du moins, leur corps, leur enveloppe physique s'y trouve. Car je n'ai nul doute que leur esprit, lui, se tient aux côtés de l'imagination depuis le début.
COUDERC : Peut-être, mais n'empêche, c'est pas très sympa pour nous tout ça ! Vous ne voulez pas nous donner un indice pour qu'on puisse comprendre aussi ?
SIR DAMON : Vous auriez besoin d'un peu plus qu'un simple indice pour appréhender ce dont je suis en train de parler... Mais si tel est votre désir. Vous n'avez qu'à vous demander quelles sont mes initiales, et alors, tout sera dit... Sur ce, je vous fait mes adieux !
GILARDI : Eh attendez une seconde, monsieur l'arbitre ! Trop tard, il est parti... bon, il a suggéré de nous rappeler ses initiales, n'est-ce pas ?
COUDERC : En effet. Les initiales de Sir Scott Damon sont... SSD... Est-ce que cela a un quelconque sens pour vous, Thierry ?
GILARDI : Pas le moins du monde, Roger. Finalement, j'ai l'impression que ce mystère restera tel quel éternellement...
SSD : Pas pour tout le monde. Parce que pour nous,
ces initiales portent plus de sens que n'importe quel autre mot.